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Au XVIIème siècle aucune des six églises ou chapelles de la paroisse de Yutz n'est dédiée à saint Nicolas. L’église principale qui sera détruite en 1815 est consacrée à saint Vite (saint Guy). Mais le culte de saint Nicolas qui s’est développé le long de la Moselle à partir du XIème siècle, est bien ancré. De nombreux calvaires ayant souvent la forme de Bildstocks, cette particularité du pays de Thionville, témoignent d’une dévotion très populaire pour le grand Thaumaturge. Saint Nicolas est traditionnellement invoqué contre les dangers des eaux. Plusieurs témoignages portés sur le cahier des miracles de Saint-Nicolas-de-Port, relatent des sauvetages extraordinaires intervenus sur les bords de Moselle aux alentours de Thionville.
Yutz dont certains quartiers sont inondables comptait parmi ses habitants plusieurs passeurs et surtout de nombreux pêcheurs confrontés tous les jours aux dangers de l’eau. Il est fort probable que les pêcheurs, tenus collectivement au paiement d’une redevance au Seigneur du lieu, se soient très tôt réunis en une sorte de corporation placée sous la protection de saint Nicolas comme paraît le confirmer un document de 1763 : « Dans le village de haute et basse Yutz, tous les habitants indistinctement ont liberté de pescher dans la rivière Moselle avec des nasses en payant à leur Seigneur une somme de trente-cinq sols, et estant obligés par l’art. 3 du titre 31 de la pesche de l’Ordonnance des Eaux et Forest du mois d’aoust de 1669 duement enregistrée, d’élire annuellement un Maître de Confrairie ou communauté, ils ont élu pour patron Saint Nicolas que l’on invoque communément dans les dangers des eaux et c’est cette confrairie qui s’appelle Confrairie de Saint Nicolas ... ».
Il y a 320 ans, l'an 1650 qui a présidé à la création ou la re-création de notre Confrérie, se situe à une période charnière de notre histoire. Les traités de Munster-Westphalie signés en 1648, sortent l'Europe de la pire des guerres qu'elle ait connue. Chez nous, l'année 1635 fut apocalyptique, ce n'était que massacres, viols, incendies et destructions auxquels il faut ajoute la peste. En l'espace de quelques mois, notre région avait perdu les deux tiers de sa population. En 1643, l'année même où Louis XIV montait sur le trône de France, Thionville capitulait et passait sous administration française avant que le traité des Pyrénées conclu en 1959 ne confirme le rattachement de notre contrée à la France.
Yutz était alors une vaste paroisse peu peuplée, on y parlait le luxembourgeois et la monnaie utilisée était toujours celle de l'Empire avec lequel nous continueront à commercer jusqu'à la Révolution. C'est dire que Versailles et le Roi-Soleil étaient bien loin de nous.
Au niveau de cette paroisse bien démunie, l'abbé Metzinger eut l'idée de créer une confrérie qui allait fonctionner comme une mutuelle avec une première idée, une idée de dignité, chaque membre de la communauté devait avoir droit à des obsèques décentes, des funérailles chrétiennes. La deuxième idée était celle de favoriser les activités agricoles, piscicoles et artisanales par des investissements. Les confrères s'octroyaient mutuellement des prêts. Un acte était dressé dans le registre de la confrérie et tous ans, à la Saint-Nicolas, le point était fait sur les remboursements. L'existence de cette mutualité permettait d'échapper aux usuriers et aux lourds émoluments des amans et autres notaires.
À cette époque qui est celle de Saint Vincent de Paul et de Saint Pierre Fourier, l’Eglise assure l’éducation, les soins et l’aide aux plus démunis. Le concept proposé par l’abbé Metzinger est très novateur puisque la Confrérie est conçue comme une sorte de mutuelle pour laquelle les droits d’entrée et le bénéfice de plusieurs quêtes dominicales permettent d’apporter une aide sous forme d’assistance et de prêt. Le curé et les membres de la confrérie sont les mieux placés pour évaluer les besoins et le sérieux du laboureur, de l’artisan ou du pêcheur qui les sollicite. Par ailleurs la confrérie assure des obsèques dignes et chrétiennes à ses membres.
Les conditions d’accès se limitaient au paiement d’un droit (trois schillings en 1650), à l'obligation d'assister un cierge à la main à la messe de la saint Nicolas et à la procession de la Fête-Dieu, au devoir d’accompagner les membres défunts a leur dernière demeure et de faire dire des messes à leur intention.
Cette Confrérie fut placée sous le patronage de saint Nicolas protecteur des navigateurs et de ces pécheurs qui s'avançaient en barque sur la Moselle pour jeter leurs filets et les relever. Mais aussi Saint Nicolas protecteur des commerçants et des biens qui veille au respect de la parole donnée, celui devant lequel on jure de rembourser la somme empruntée.
Cette activité « bancaire » de notre Confrérie est, sans aucun doute, ce qui lui a permis de survivre à la loi Le Chapelier de 1792 jusqu'à ce qu'en 1833, Mgr Besson, évêque de Metz, lui accorde de nouveaux statuts qui font d'elle une œuvre de dévotion.
Notre Confrérie est une institution religieuse, elle l'assume dans la Foi, dans l'Espérance et dans la Charité. Située au cœur d'une paroisse, elle n'en est pas moins membre de l'Église universelle. Il existe à Yutz, les associations et des œuvres chrétiennes ou laïques qui, sans nous détourner de son esprit, nous mènent loin de notre clocher. Ses associations nous rappellent que nous sommes tous solitaires, et que ce que nous avons construit ici en 1650, est valable pour tous ceux qui croient en la dignité de l'homme et en la force de l'Amour.
La levée du siège de Metz, en 1553 ; il sera à l'origine du personnage "noir" compagnon de Saint Nicolas.
La levée du siège de Metz, en 1553 ; il sera à l'origine du personnage "noir" compagnon de Saint Nicolas.
Ce tableau se trouve dans la salle des Assises de la Moselle au Palais de Justice de Metz, c'est une copie qui a été réalisée en 1922 pour le musée de Metz sur la proposition du Général de Lardemelle, Gouverneur militaire de Metz et membre du conseil d'administration du Musée. L'original du tableau peint en 1876 par Lucien-Etienne MELINGUE (1841-1889) est conservé au musée de Dijon où le Général de Lardemelle l'avait vu. Peindre ce tableau en 1876 était un acte patriotique quand un nouvel empereur allemand venait d'annexer Metz.
Aparté : Charles Qui(nt) ? ... Le Père Fouettard !
Mon ami Jean-François TRITSCHLER, Chancelier de la Confrérie, m'a raconté un jour une histoire sur Charles Quint qui, sur la fin de la guerre de 30 ans, se serait présenté face aux portes de la ville de Metz, tout de noir vêtu de la tête au pied, un fouet à la main, et aurait sommé les messins d'ouvrir leurs portes en jouant du fouet … Il n'en fallait pas plus pour donner naissance au compagnon de Saint-Nicolas ...
Son origine nous est rapportée dans un journal de famille, manuscrit que tenait un messin HUBERT BIRELET, commerçant en grains à Metz, 3 en Jurue.
A la page "Décembre 1589" on peut lire :
« Mon grand'père, Jehan COLLIGNON, me disait que, de son temps, il connaissait peut-être Saint-Nicolas, le grand saint qui comble les enfantelets, mais certainement pas le père Fouettard.
Mon aïeul nourrissait un profond mépris pour le père Fouettard. Pourtant d'après les échos familiaux, lui-même ne s'était point privé de tanner les fesses de ses rejetons, dont mon père, pour bien les éduquer.
C'est l'année dernière (1588) seulement que j'ai compris pourquoi les vieux messins méprisent l'habituel compagnon de Saint-Nicolas.
Or donc, avant l'an 1552, Saint-Nicolas venait seul le 6 décembre apporter jeux et friandises aux enfants sages ... aux autres aussi d'ailleurs. Mais, cette année-là, alors que les Trois Évêchés étaient tombés dans l'obédience française, le vilain empereur Charles-Quint vint mettre le siège devant Metz.
La bataille fut dure, longue et pénible. Les messins avaient dû faire appel au roi de France pour les aider à repousser l'envahisseur. Le siège ne fut levé qu'au mois de Janvier 1553.
Or, pour relever le courage des messin, la corporation des Tanneurs avait inventé, au cours du siège, un personnage grotesque, armé d'un fouet, qui poursuivait jouvencelles et bachelettes, petits valets et damoiseaux au long des rues affamées de Metz.
Ce personnage personnifiait Charles-Quint, le tyran qui voulait conquérir la ville. L'année suivante, pour se réjouir de la libération, la corporation des Tanneurs ressuscita le vilain personnage au fouet. Son passage coïncida quelque peu avec celui de Saint-Nicolas.
Les années passèrent et, progressivement, il fut coutume de faire sortir Saint-Nicolas, récompensant les bons et la caricature de Charles-Quint, récompensant les méchants, de façon brûlante pour leur séant.
Gens pacifiques, les messins oublièrent Charles-Quint et baptisèrent "père Fouettard" le compagnon du saint aux enfants. L'image se répandit peu à peu dans le Nord et c'est ainsi que le Père Fouettard, d'invention messine, connut de beaux jours en Allemagne, en Hollande et en Belgique terrifiant les enfants et soulageant les problèmes éducatifs de quelques parents ».
Version messine certes, mais le père Fouettard n'est-il pas celui qui nous permet de constater que dans l'homme il n'y a pas que la bonté ? Dans le miroir des dieux de l'antiquité l'homme se regarde et y découvre son propre visage, sa propre personne ballotée continuellement entre l'amour et le mal, la paix et la guerre, la bonté et la méchanceté. Ne retrouvons-nous pas la même chose dans les personnifications de la bonté et de la méchanceté à travers Saint-Nicolas et le Père Fouettard ? Il y a comme un phénomène d'équilibre entre la bonté et la méchanceté.
D'après R. WEIDMAN - "Saint Nicolas et le Cycle des Douze Jours".
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